
Contexte
La Nouvelle-Calédonie est un territoire particulier en termes d’enjeux environnementaux. C’est un hotspot de biodiversité, qui renferme un fort endémisme. L’économie locale a un impact sur l’environnement, notamment les industries du secteur de la mine et la métallurgie. Les acteurs chargés de la mise en œuvre des politiques publiques de développement et de protection de l’environnement ont besoin de suivre l’état de l’environnement afin d’évaluer l’efficacité de leurs actions, prioriser des politiques et des mesures de gestion, et établir ainsi de manière objective leur contribution à la conservation de la biodiversité et du capital naturel.
L’ESGAP (Environmental Sustainability Gap) est un indicateur synthétique reposant sur un tableau de bord permettant de suivre l’état de l’environnement dans une perspective de durabilité forte, c’est-à-dire en adoptant des critères exigeants concernant la non-substituabilité du capital naturel par d’autres formes de capital (physique entre autre) dans un territoire ou un pays. Il permet de renseigner les évolutions de l’état fonctionnel de différentes composantes de l’environnement, en mettant l’accent sur les écarts qui existent entre ces évolutions et les objectifs de maintien ou d’atteinte du « bon état environnemental » pour chacune de ces composantes. L’ESGAP dans sa forme actuelle a été développé conceptuellement en se basant sur l’Union européenne comme cas d’étude.
Cette évaluation est réalisée par la Chaire Comptabilité Écologique, en partenariat avec le programme « Conserver le capital naturel » du WWF France.
Objectif
Ce projet pilote de mise en œuvre du tableau de bord ESGAP en Nouvelle-Calédonie a pour objectif d’évaluer l’opérationnalité de cet outil dans des territoires où les données sur l’état de l’environnement, et les pressions qui s’exercent sur ce dernier, sont souvent parcellaires.
Le projet repose sur une première étude menée à l’échelle de l’Europe qui a abouti à la réalisation d’une méthodologie et d’un tableau de bord avec deux indicateurs : l'indice SES (Strong Environmental Sustainaibility Index) et l'indicateur de dynamique SESP (SES Progress).
L’objectif du projet pilote est d’enrichir et de mettre en œuvre l’ESGAP en Nouvelle-Calédonie, afin d’informer la décision publique et d’alimenter le plaidoyer pour l’utilisation de ce type d’outils.
Méthode
La méthodologie utilisée dans ce projet s'est fondée sur le travail de l’équipe de Paul Ekins au UCL Institute for Sustainable Resources, développé conceptuellement en prenant l’Union européenne comme cas d’étude. La méthode ESGAP prend en compte l’utilisation durable des ressources naturelles, la charge critique de pollution des écosystèmes, la biodiversité, la santé et le bien-être humain et identifie le niveau de soutenabilité du territoire pour maintenir le bon fonctionnement de ces quatre composantes. Elle a été adaptée au territoire calédonien, aux contraintes institutionnelles et aux particularités écologiques régionales.
Ce projet s'est appuyé sur un travail de terrain en Nouvelle-Calédonie. Une trentaine d’acteurs en charge de la gestion de l’environnement (incluant décideurs, gestionnaires, centres de recherche, associations, et secteur privé) ont été consultés de manière à :
- renseigner les fonctions environnementales décrites et les ajuster au contexte local ;
- définir les objectifs environnementaux à atteindre ou à maintenir, ainsi que les indicateurs qui y sont associés dans le contexte calédonien ;
- à collecter les données nécessaires à la construction des indicateurs.
Des analyses statistiques ont ensuite été réalisées pour développer les indicateurs composites du ESGAP à partir des bases de données produites.
Résultats
Ce projet a permis de calculer un score de soutenabilité environnementale pour la Nouvelle-Calédonie : de manière agrégée, le territoire a un score de 43 % de soutenabilité, représentant donc encore un écart de 57 % par rapport à un état soutenable. Ce projet a également permis de formuler des recommandations pour la pérennisation de l’indicateur sur le territoire et le développement de systèmes de données environnementales.
Il a donné lieu à la publication Vers une évaluation fiable de la soutenabilité environnementale des territoires (septembre 2021).
Enseignements
Malgré des données éparpillées et parcellaires, l’analyse révèle le mauvais état de la fonction de charge critique en pollution des écosystèmes en Nouvelle-Calédonie. Les émissions de gaz à effet de serre, les surfaces brûlées et la qualité des eaux de baignade ont notamment des trajectoires qui s’éloignent de l’objectif de bon état. Les fonctions liées aux ressources, la biodiversité et la santé humaine sont en revanche dans un état relativement soutenable. L’analyse ESGAP montre par exemple que les ressources halieutiques et la qualité de l’air extérieur ont atteint leurs objectifs de soutenabilité et peuvent être maintenues dans le temps. En pointant les manques, l'ESGAP peut initier une amélioration du pilotage du capital naturel.
Lire la tribune : Biodiversité : un nouvel indicateur pour mesurer l’écart entre l’état de la planète et les objectifs à atteindre
En outre, la mise en œuvre du ESGAP révèle le manque criant de données sur l’état de l’environnement dans les pays et territoires en développement. Des efforts concertés sur les cadres internationaux peuvent améliorer la qualité et la disponibilité des données environnementales. Les consultations autour du ESGAP révèlent également un manque de cadres réglementaires associés à des objectifs environnementaux et scientifiques quantifiés et temporalisés. Le cadre ESGAP permet néanmoins de synthétiser l’état du maintien du capital naturel et peut être utilisé pour la gestion de l’environnement, même avec un jeu partiel d’indicateurs.
Enfin, le projet a permis de tirer des enseignements pour la mise en œuvre de l'ESGAP dans d’autres pays, et d’établir des liens avec d’autres cadres globaux de suivi de la soutenabilité. Des projets pilotes ont également été menés au Vietnam et au Kenya.
Le rapport final est disponible sur le site de la Chaire et du WWF France.
Contact :
- Oskar Lecuyer, chargé de recherche à l'AFD

Contexte
Le projet d’élaboration d’une trajectoire de décarbonation profonde au Nigéria (DDP-Nigeria) est la première application pays du programme DDP-Afrique, une collaboration entre l’Agence française de développement (AFD) et l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales (IDDRI), qui vise à diffuser dans les pays africains l’expérience de l’initiative des Deep Decarbonization Pathways (DDP). Cette initiative internationale est opérationnelle dans un certain nombre de pays industrialisés, émergents et en développement depuis 2014 pour aider les gouvernements et les acteurs non étatiques à faire des choix qui mettent les économies et les sociétés sur la voie d’un monde neutre en carbone d’ici la seconde moitié du siècle.
Au Nigéria, un processus d’élaboration d’une vision d’un développement basses émissions de long-terme est en cours. Cet exercice de vision est envisagé comme une première étape vers une stratégie nationale plus détaillée et quantifiée, à développer post-2020, avec en ligne de mire le Global Stocktake prévu par l’accord de Paris en 2023. Cet événement pourrait en effet constituer un moment de cristallisation à l’échelle internationale pour la soumission de stratégies de long-terme, à même de soutenir la révision des contributions déterminées nationales (CDN) en 2025. C’est ce dernier processus qui constitue la cible principale du présent projet.
Objectif
Mis en œuvre avec la Alex Ekwueme Federal University Ndufu-Alike Ikwo (AE-FUNAI) et l’IDDRI, le programme DDP-Afrique prévoit :
- la mobilisation et le renforcement des capacités des équipes locales d’experts et de chercheurs pour l’analyse scientifique des voies de développement à faibles émissions ;
- la production d’études par pays analysant les stratégies de développement à faibles émissions spécifiques à chaque pays ;
- la contribution au débat sur les politiques publiques et l’évaluation des projets à la lumière de l’objectif de faible émission ;
- la structuration d’une communauté de pratiques entre les institutions de recherche africaines pour faciliter le partage des connaissances. Le programme sera composé de plusieurs projets nationaux, le Nigeria est le premier d’entre eux et le Sénégal a déjà été sélectionné pour être le second ;
- la diffusion des résultats vers la communauté internationale du climat pour contribuer au processus global dans le cadre de l’Accord de Paris.
Méthode
Le projet vise à adapter et mettre en œuvre la méthodologie testée par l’initiative Deep Decarbonization Pathways avec l’équipe du professeur Chukwumerije Okereke de la Alex Ekwueme Federal University Ndufu-Alike Ikwo (AE-FUNAI), en partenariat avec l’IDDRI.
Résultats
Ce projet permettra un transfert de connaissance et d’expérience entre équipes, la structuration du réseau DDP en Afrique, la construction des trajectoires de décarbonation suivant le cadre méthodologique DDP, l’organisation d’un forum de discussion avec toutes les parties nationales – y compris le gouvernement – sur les trajectoires de développement du pays, ainsi que la participation aux débats internationaux.
Contacts :