
Contexte
Selon un rapport de l’OCDE de 2021, les deux tiers des villes africaines sont exposés à un risque « extrême » de chocs liés au climat et à l’eau. Les événements climatiques violents, les vagues de chaleurs et les sécheresses figurent ainsi en tête des risques encourus par les zones urbaines. L’urbanisation rapide, le développement non durable et la dégradation des écosystèmes naturels exacerbent ces risques.
Les solutions fondées sur la nature (SFN), actions qui s’appuient sur les écosystèmes naturels et les services qu’ils fournissent aux activités humaines, permettent de relever ces défis urbains, tout en apportant simultanément des avantages en termes de bien-être humain et de biodiversité. Toutefois, elles ne sont encore que peu intégrées dans les processus de planification urbaine et dans les outils d’aide à la décision à disposition des urbanistes. Le manque de connaissances, de données et d’expérimentations sur les solutions fondées sur la nature freinent donc leur adoption et leur déploiement.
Ce projet fait partie du programme de recherche ECOPRONAT, qui soutient des recherches sur une meilleure prise en compte et une plus grande intégration (mainstreaming) de la biodiversité dans des secteurs économiques-clés.
Objectif
L’objectif de ce projet de recherche est de permettre, à travers la construction d’un cadre stratégique, le déploiement et le passage à l’échelle des solutions fondées sur la nature (SFN), en particulier pour faire face aux risques liés à l’eau et à la chaleur. L’enjeu est d’améliorer la résilience écologique des villes en les aidant à identifier les risques auxquels elles doivent se préparer, à évaluer le potentiel des SFN pour y répondre et à élaborer des stratégies de mise en œuvre et de financement de ces SFN dans le cadre du processus de planification urbaine.
Une méthodologie d’évaluation du potentiel lié aux SFN, à la fois rapide, efficace et pratique, sera ainsi mise à disposition des villes d’Addis-Abeba et de Kigali, qui sont les deux villes pilotes de ce projet de recherche. Le projet est mené par WRI, en partenariat avec le service de développement urbain d’Addis-Abeba, l’Institut éthiopien d’architecture et l’Association des jeunes professionnels de l’eau du Rwanda. Cette méthodologie a vocation à être adoptée par d’autres centres urbains pour permettre une plus large appropriation et mobilisation des SFN en ville.
Méthode
La construction de ce cadre stratégique pour les SFN présente plusieurs points d’intérêt sur le plan méthodologique :
- Identification des risques d’inondation, d’îlots de chaleur, d’approvisionnement en eau et du potentiel de biodiversité des villes par la production de cartes composites et la mobilisation de données satellites ;
- Construction participative du cadre stratégique via des ateliers de travail avec les parties prenantes des deux villes pour valider les zones prioritaires d’intervention et identifier les SFN les plus adaptées aux problématiques de chaque zone.
Résultats
Développé par l'équipe de recherche de WRI en collaboration avec les villes d'Addis-Abeba et de Kigali, le cadre stratégique sur les solutions fondées sur la nature (SFN) peut aider les villes à sélectionner et à mettre en œuvre des SFN appropriées. En intégrant des ensembles de données disponibles à l'échelle mondiale avec des données locales, il permet d'identifier les zones d'une ville donnée qui sont vulnérables aux inondations et aux chaleurs extrêmes, ainsi que les possibilités d'étendre les espaces verts urbains et de créer des corridors écologiques.
Pour une mise en œuvre réussie, la collaboration entre les autorités publiques, les experts techniques et les responsables locaux est essentielle. Ce cadre permet de générer rapidement des cartes à l'échelle de la ville afin d'identifier les zones prioritaires. Après validation par les parties prenantes de la ville, les experts de terrain jouent alors un rôle essentiel dans la conception de SFN efficaces, adaptés aux conditions locales.
Bien qu'il présente des limites au niveau du détail des données, le cadre constitue un point de départ solide pour construire des villes durables. Un guide complémentaire fournit des informations techniques sur les SFN utilisables, ainsi que des études de cas. Ce guide associé au cadre stratégique est téléchargeable ci-dessous (en anglais) :
Un webinaire de la série Conversations de recherche a été organisé pour présenter les résultats du projet et le projet a débouché sur une série d'enseignements, synthétisés dans un policy brief accessible ci-dessous.
Enseignements
Le projet de recherche a débouché sur une série d’enseignements pour faciliter le déploiement des solutions fondées sur la nature (SFN), prenant en compte les besoins spécifiques des villes. Ces enseignements mettent en lumière le potentiel de la nature dans la planification de la résilience urbaine et l’action climatique :
- Pour renforcer la sensibilisation et l’intégration institutionnelle :
- Mettre en place des processus multi-acteurs pour favoriser la concertation et la priorisation des SFN identifiées.
- S’appuyer sur des exemples concrets pour faciliter la compréhension et l’adhésion.
- Pour améliorer la disponibilité des données pour la planification :
- Croiser données locales et globales pour procéder à des analyses multirisques (inondations, îlots de chaleur, etc.).
- Encourager la science citoyenne pour enrichir et valider les données, et les prendre en compte dans la prise de décision.
- Pour mieux coordonner les phases de planification et de mise en œuvre :
- Créer des instances de gouvernance dédiées (comme un comité municipal) pour coordonner les multiples services techniques impliqués et mobiliser les financements.
- Élaborer des référentiels communs (normes, guides…) pour renforcer le soutien politique et citoyen.
- Pour sécuriser des financements sur le long terme :
- Intégrer les SFN dans les programmes d’investissement urbains existants.
- Promouvoir les partenariats public-privé et utiliser des cadres d’évaluation multi-bénéfices pour démontrer leur valeur sur le long terme.
- Pour adapter les solutions au contexte local et assurer le suivi :
- Lancer des projets pilotes avec des dispositifs de suivi pour évaluer les impacts concrets.
- Intégrer les dimensions de genre, d’équité et d’inclusion dès la phase de sélection d’une SfN.
Aller plus loin
Les autres projets sur les SFN soutenus par ECOPRONAT

Contexte
L’Amérique latine est la deuxième région la plus urbanisée de la planète, 81% de sa population y étant concentrée. Cette forte urbanisation, sa rapide progression et la faiblesse des politiques de planification urbaine affectent des zones à haute valeur écologique et environnementale. Pourtant, les écosystèmes naturels peuvent être source de solutions pour les acteurs de la conception et de l’aménagement urbain, en particulier pour répondre aux risques générés ou exacerbés par le changement climatique.
Comprendre les solutions fondées sur la nature (SFN), étudier leurs conditions de mises en œuvre et analyser leur intégration dans les politiques publiques s’avère donc nécessaire pour garantir l’habitabilité des villes à long terme. Si les SFN et infrastructures vertes sont encore récentes dans le paysage urbain, des initiatives sont déployées depuis plusieurs années et constituent une source de données privilégiée à exploiter.
Ce projet fait partie du programme de recherche ECOPRONAT, qui soutient des travaux de recherche sur une meilleure prise en compte et une plus grande intégration (mainstreaming) de la biodiversité dans des secteurs économiques-clés.
Objectifs
Le projet ENSLAC (Enabling Nature based Solutions in Latin American Cities) vise à analyser les mécanismes qui permettent le passage à l’échelle de la mise en œuvre des SFN dans les villes d’Amérique latine, en s’appuyant sur 15 études de cas au Pérou, en Colombie et en Equateur. Cette démarche de recherche vise à :
- Analyser les enjeux de la restauration écologique pour la gestion des risques liés aux impacts du changement climatiques en milieu urbain ;
- Comprendre les leviers d’utilisation des SFN comme outil de planification et de développement du territoire urbain ;
- Identifier les processus temporels, techniques, culturels, politiques, sociaux, financiers et coopératifs qui ont permis la réalisation de projets à grande échelle basés sur les SFN ;
- Evaluer l’influence des stratégies et politiques nationales ou supranationales sur le développement des SFN ;
- Diffuser les connaissances acquises en privilégiant les formats et canaux pouvant être utilisés pour la formation professionnelle des acteurs du développement.
Pour cela, Yes Innovation, entreprise basée à Quito en Equateur, travaille de concert avec l’Institut Humboldt pour la recherche sur les ressources biologiques, institution liée au ministère de l’Environnement de Colombie, et Periferia Territorios Vivos, organisation péruvienne spécialisée dans l’urbanisme avec une approche écologique.
Méthode
Ce projet de recherche mobilise deux outils d’analyse (en fonction des études de cas et des données de terrain disponibles) :
- Analyse temporelle et spatiale connue sous le nom de BA/CI, qui fait référence à une analyse Avant/Après et Conservation/Intervention.
- Analyse comparative entre les études de cas sur les SFN et des cas référents de caractéristiques comparables mais sans mise en œuvre de SFN.
Résultats
Ce projet de recherche vise à :
- Comprendre les mécanismes qui permettent le passage à l’échelle des solutions fondées sur la nature comme outil de planification urbaine et péri-urbaine ;
- Identifier des leviers de réplicabilité des ces SFN pour les villes d’Amérique latine ;
- Produire des supports de formation à destination des acteurs du développement urbain.
Un webinaire de la série Conversations de recherche, disponible en replay, a permis de présenter les résultats du projet de recherche.
Aller plus loin
Les autres projets sur les SFN soutenus par ECOPRONAT
Élaborer un cadre stratégique pour les solutions fondées sur la nature en ville
En cours
2022 - 2024


Contexte
Aujourd’hui, la majorité des dirigeants reconnaissent la dégradation du capital naturel et l'urgente nécessité de protéger l'environnement. Mais, pour définir des politiques publiques adaptées, ils doivent pouvoir s’appuyer sur des standards scientifiques leur permettant d’évaluer l’état du capital naturel d’un territoire.
Il reste difficile d'évaluer cet état, ou même de définir exactement ce que devrait être un « bon état » de la planète : la plupart des instruments existants ont une définition incomplète de la durabilité environnementale, manquent d'indicateurs pertinents ou ne parviennent pas à définir des objectifs appropriés pour atteindre un bon état environnemental. Il n'existe donc pas d'approche satisfaisante qui permettrait aux décideurs ou aux experts de savoir si un pays se dirige ou non vers la durabilité environnementale.
Fondé sur un tableau de bord évaluant l’état de 23 composantes de l’environnement, le cadre ESGAP vise à répondre à ce besoin. Cependant, l'absence de normes appropriées pour de nombreuses contributions essentielles du capital naturel et dans de nombreux pays est l'une des lacunes les plus notables identifiées dans les projets pilotes ESGAP en Nouvelle-Calédonie, au Kenya et au Vietnam.
Regarder la vidéo : Mesurer le bon état de la planète
Objectif
Ce projet de recherche avec EcoAct a eu pour objectif de recenser les normes manquantes pour plusieurs composantes de l'Environmental Sustainability Gap (ESGAP). Il discute des stratégies possibles pour développer des normes appropriées dans le cas où aucune norme n'est disponible à l'échelle mondiale.
Méthode
L'ESGAP est un outil innovant développé initialement avec l'University College London (UCL) qui évalue l’état des fonctions environnementales d’un territoire et de leur niveau de soutenabilité. Pour toutes les composantes critiques du capital naturel sur le territoire concerné (qualité de l’air ou des eaux, pollutions, ressources forestières, ressources halieutiques, etc.), cet indicateur calcule l'écart entre leur état actuel et un état qui serait soutenable (c'est-à-dire un état compatible avec un fonctionnement durable des processus nécessaires à la préservation de la vie, des activités humaines et du bien-être). Cela permet de calculer un « écart de soutenabilité environnementale », qui met en lumière le chemin à parcourir pour atteindre le stade de soutenabilité environnementale. Cela peut ensuite servir de guide aux politiques publiques pour estimer et préserver l’état naturel d’un territoire donné.
Résultats
Sur les 22 indicateurs du cadre ESGAP examinés dans ce projet, 16 ont fait l’objet d’une proposition de standard. Pour 8 indicateurs, il n’y a pas d'informations suffisamment solides pour proposer une norme applicable au niveau mondial. L’étude a identifié 13 ensembles de données disponibles pour calculer ces indicateurs à l'échelle mondiale et fourni la source et le lien pour accéder à ces bases de données accessibles au public.
Consulter le rapport final : Defining Standards of Good Ecological Condition for Computing the ESGAP in Developing Countries
Enseignements
L'étape suivante pour produire une norme de bon état écologique applicable à tous les pays implique, pour les indicateurs avec "normes à définir par des experts" (Fairbrass, 2020), d'examiner qui pourraient être les experts et comment s'engager avec eux pour définir une norme applicable au niveau mondial. Cela dépend de l'existence d'une autorité reconnue au niveau mondial (comme l'Organisation mondiale de la santé pour la pollution ou l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture en ce qui concerne la pêche), ou si l'indicateur est développé par différentes équipes de scientifiques ou organisations.
Des travaux futurs pourraient également se concentrer sur l'examen de l'état des connaissances et des options concernant la définition de normes à partir de sources non conventionnelles, telles que les données géospatiales, les big earth data, etc. Le projet ARIES lié à la compilation des comptes des écosystèmes dans le cadre du système SEEA-EA (System of Environmental-Economic Accounting – Ecosystem Accounting) pourrait être une source intéressante pour cela.
En savoir plus sur l'ESGAP :
- A single indicator of strong sustainability for development: Theoretical basis and practical implementation (2019)
- Monitoring the Environmental Sustainability of Countries through the Strong Environmental Sustainability Index (2022)
- Are We on the Right Path? Measuring Progress towards Environmental Sustainability in European Countries (2022)
Contact :
- Oskar Lecuyer, chargé de recherche à l'AFD