
Contexte
L'Afrique du Sud a besoin d'investissements importants pour passer à une économie à faibles émissions de carbone et pour mettre en place des infrastructures résilientes, en particulier dans les secteurs de l'énergie et de l'eau. Fortement dépendante du charbon et confrontée à une raréfaction de l'eau en raison du changement climatique, le pays doit impérativement s'orienter vers la durabilité pour garantir sa stabilité environnementale et économique à long terme.
Avec le soutien de l'AFD, l'Université du Cap (UCT), la Banque de développement d'Afrique australe (DBSA), la Commission présidentielle sur le climat (PCC), le Trésor national et le Centre for Sustainability Transitions de l'Université de Stellenbosch développent un modèle qui évalue les impacts macroéconomiques ainsi que les différentes options de politiques publiques et mécanismes de financement pour la transition des systèmes d'eau, d'énergie et d'alimentation en Afrique du Sud, en réponse aux défis climatiques. Ce projet s'inscrit dans le cadre de l'initiative « Afrique du Sud: vers un développement économique inclusif » (SA-TIED), un programme de recherche et de politique visant à favoriser une croissance économique inclusive dans le pays.
Le programme GEMMES développe un modèle théorique général, ainsi que des modèles nationaux appliqués à des cas concrets et adaptés aux caractéristiques de chaque pays, y compris le modèle GEMMES Afrique du Sud.
EN SAVOIR PLUS SUR GEMMES
L'AFD et les outils de modélisation macroéconomiques pour la transition écologique
Objectif
Le projet GEMMES Afrique du Sud vise à :
- Analyser les impacts macrofinanciers de la transition vers les énergies renouvelables, assurer la sécurité de l'eau et maintenir la durabilité alimentaire ;
- Fournir aux décideurs politiques des informations et des prévisions pour éclairer la prise de décision et la planification à long terme de la croissance économique, de l'emploi et de la résilience climatique, et plus spécifiquement des informations sur les effets macroéconomiques des investissements résilients au climat jusqu'en 2050 ;
- Améliorer la compréhension des vulnérabilités et des opportunités de la transition en Afrique du Sud, en intégrant les boucles de rétroaction macrofinancière dans l'analyse des changements structurels ;
- Favoriser le développement durable et atténuer les risques environnementaux, en contribuant à la stabilité économique à long terme et à l'amélioration de la qualité de vie ;
- Promouvoir le dialogue sur les politiques publiques relatives à la transition vers une Afrique du Sud à faibles émissions de carbone.
Méthode
Outre son approche transdisciplinaire particulière, qui fait de ce projet l'un des rares à intégrer la notion de soutenabilité forte, l'originalité de GEMMES réside dans sa prise en compte des déséquilibres macro-financiers et de l'impact de la transition bas-carbone sur l'ensemble des éléments de la balance des paiements.
GEMMES Afrique du Sud s'appuie sur le modèle de transition énergétique SATIM-GE de l'Université de Cape Town (UCT), qui intègre des boucles de rétroaction macro-financières. Ces boucles fournissent des informations essentielles sur les vulnérabilités économiques du pays et les opportunités d'investissement pendant cette transition.
GEMMES Afrique du Sud est construit en partenariat avec les autorités locales et les instituts de recherche pour garantir que l'outil est cohérent avec les besoins du pays et que les partenaires sont capables de l'utiliser et de l'améliorer de manière indépendante. Il prendra en compte
- la dynamique des taux d'intérêt et de change et leur impact sur l'investissement privé et l'emploi ;
- les contraintes budgétaires et macro-financières ;
- les dynamiques différentes entre les banques et les institutions financières non bancaires ;
- la capacité des investissements publics dans les infrastructures vertes à conduire un nouveau plan de transformation écologique ;
- les impacts des changements climatiques.
Résultats attendus
Le projet GEMMES Afrique du Sud débouchera sur plusieurs publications, dont :
- Une présentation des spécificités de GEMMES Afrique du Sud et de ses simulations de référence ;
- Les implications macro-financières des investissements en infrastructures ;
- Les implications macro-financières des impacts du changement climatique ;
Ces documents fourniront des informations précieuses sur les résultats du projet et contribueront aux discussions en cours dans ce domaine.
Enseignements
À ce stade, et alors que le projet en est encore à ses premières phases, on s'attend à ce que l'intégration des boucles de rétroaction macro-financière joue un rôle important dans l'élaboration de politiques et de stratégies d'investissement efficaces. Au fur et à mesure que le projet progressera, le dialogue continu avec les parties prenantes sera crucial pour affiner ces concepts et relever les défis du processus de transition.
Télécharger les publications relatives à d'autres projets de modélisation en Afrique du Sud :
- Socio-economic and spatially-explicit assessment nature-related risks: The case of South Africa (décembre 2023, en anglais)
- Demand-induced transition risks in South Africa (décembre 2023, en anglais)
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Contexte
De nombreuses études analysant les risques pour la stabilité des systèmes financiers liés à la dégradation de la nature (RDN) ont été publiées récemment pour les Pays-Bas, la France, ou d’autres pays. Elles soulignent toutes que la perte de biodiversité peut avoir des effets déstabilisateurs importants, soit par l'effondrement des écosystèmes et des services qu'ils rendent à l'économie (ce que l’on appelle les « chocs physiques »), soit par des changements de comportement, de technologie ou de réglementation mis en œuvre dans le cadre d'une transition écologique (« choc de transition »).
Objectif
L’étude, centrée sur le cas de l’Afrique du Sud, évaluera les effets potentiels – en termes de production, de génération de revenus, d’inflation, d’emplois, de salaires, d’équilibre de la balance extérieure et de stabilité budgétaire – d’un choc physique (lié à une dégradation des services rendus par les écosystèmes) ou d’un choc de transition (lié à des mesures ou des innovations contribuant à réduire les pressions exercées par certains secteurs de l’économie sur la biodiversité).
En complément de cette analyse globale, la méthode tente de localiser précisément ces risques sur le territoire, afin d’informer les décideurs locaux et de les aider à prendre des mesures de transition écologiques informées.
Mais ces risques dépassent largement le seul secteur financier, notamment dans les pays en développement. Comment mieux prendre en compte le contexte macro-financier dans l'analyse des RDN dans les pays émergents où il joue un rôle clé dans la résilience des entreprises ou des institutions ? Par rapport à la question climatique, comment mieux prendre en compte l'aspect territorial des risques liés à la nature et mener une évaluation spatialement explicite ?
Programme de recherche associé
Méthode
Cette étude introduit de nouvelles méthodes d'évaluation des risques socio-économiques liés à la dégradation de la nature, en s'appuyant sur deux contributions principales :
- Elle mène une analyse multidimensionnelle de l'exposition de plusieurs variables macro-financières et sociales aux risques liés à la nature. Basée sur des tableaux entrées-sorties (à l'image du modèle ESTEEM) étendus à l'environnement et des comptes satellites socio-économiques, l'analyse identifie comment les risques pourraient exercer des impacts significatifs sur des secteurs directement et indirectement essentiels pour les chaînes de production, et ensuite pour les équilibres socio-économiques.
- La méthode propose une évaluation spatiale plus granulaire, au niveau des municipalités sud-africaines, en étudiant les vulnérabilités liées à la nature. Cette démarche nécessite la mise en cohérence de données économiques spatialisées avec des données écologiques cartographiées. Les résultats localisent donc les expositions socio-économiques.
Ces deux démarches reliées entre elles soulignent l'importance d'une approche holistique des risques liés à la nature, combinant les connaissances des économistes et des écologistes, et capable de mettre l'accent sur les objectifs conjoints de prospérité économique, de stabilité sociale et de durabilité environnementale.
Enseignements
L’étude permet d’identifier des secteurs économiques potentiellement exposés à des risques importants et offre l’opportunité aux acteurs sud-africains de mener des études plus poussées afin de préciser l’ampleur et la matérialité de ces risques.
Par exemple, en Afrique du Sud, 80 % des exportations du pays et 60% des prêts aux entreprises apparaissent fortement dépendantes des services d’approvisionnement en eau fournis par les écosystèmes. Outre l'exposition directe à ces risques, un choc subi par les secteurs qui dépendent du service écosystémique d’approvisionnement en eau peut se propager ("en cascade") dans l'ensemble du réseau industriel, sous la forme d'effets sur la demande ou sur l'offre. Alors que 18 % des emplois et 24 % des salaires sont directement exposés à ces risques (notamment dans les secteurs de l'immobilier et de l'industrie manufacturière), ces expositions passent respectivement à 48 % et 56 % si l'on inclut les activités indirectement exposées au travers des chaines de valeurs.
La biodiversité étant très dépendante des facteurs géographiques, il est important de compléter les analyses précédentes, par des analyses géolocalisées : il faut identifier quelles activités économiques se situent là où les écosystèmes et les services qu’ils fournissent sont dégradés. Quand on tient compte de la localisation des entreprises contribuant aux exportations, le premier chiffre de 80% des exportations sud-africaines dépendantes de l’approvisionnement en eaux de surface est ramené à près de 23 % d’exportation vulnérables à ce service écosystémique. Cela signifie que 23% des exportations sont générées par des activités dépendantes à l’approvisionnement en eaux de surface et qui sont, en plus, situées dans des municipalités où le service écosystémique est sensiblement dégradé. En d'autres termes, en tenant compte de la localisation des services écosystémiques dégradés, il apparaît que près d'un quart des exportations nettes semble directement vulnérable au manque d'eau.
Pour aller plus loin :
- Lire le papier de recherche : Socio-economic and spatially-explicit assessment of nature-related risks – The case of South Africa
- Lire le papier de recherche : A framework to assess socioeconomic and spatialized nature-related risks: An application to South Africa (Environmental and Sustainability Indicators, 2025)
- Revoir le webinaire Conversation de recherche consacré aux résultats avec les partenaires sud-africains
Suites du projet de recherche
La méthode et les résultats de l’étude ont suscité l’intérêt d’un grand nombre d’acteurs économiques et des sciences de l’environnement, confirmant la pertinence de la méthode. Moins que les valeurs précises des résultats, ce sont les ordres de grandeur et l’identification des secteurs économiques fortement dépendants aux services rendus par les écosystèmes (exposés à un risque physique) ou exerçant le plus de pressions sur la biodiversité (exposés à un risque de transition) qui suscitent l’intérêt et le débat.
En effet, l’un des principaux résultats a été de susciter l’intérêt et le dialogue entre des acteurs sud-africains qui échangeaient peu jusqu’à présent, notamment l’Institut national de la biodiversité (SANBI), le ministère de l’Environnement, le ministère des Finances ou encore la Banque centrale (South African Reserve Bank, SARB).
Les acteurs sud-africains travaillent actuellement à traduire ces résultats techniques en documents accessibles pour une audience de non-spécialistes et pour générer des débats plus approfondis avec des acteurs des principaux secteurs identifiés comme exposés à des risques, ou vecteurs d’opportunités pour des secteurs résilients à fort impacts positifs socio-économiques.
Par ailleurs, la Banque centrale d’Afrique du Sud est en train d’utiliser cette méthode pour réaliser avec l’AFD une évaluation de l’exposition du secteur financier pour l’ensemble des pays membres de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC). La Banque de développement d’Afrique du Sud (DBSA) a aussi commencé à utiliser cette méthode pour évaluer l’exposition de son propre portefeuille. D’autres développements et améliorations de la méthode pourraient suivre à l’avenir.
Contacts
- Paul Hadji-Lazaro, macroéconomiste écologique à l'AFD
- Julien Calas, chargé de recherche biodiversité à l'AFD
- Antoine Godin, responsable de la cellule modélisation macroéconomique GEMMES à l'AFD
- Andrew Skowno, coordinateur de l'analyse de la biodiversité nationale à SANBI
- Pamela Sekese, consultante en matière de géospatial
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